Pour la conclusion d’un rapport conjoint sur les progrès de la négociation institutionnelle entre la Suisse et l’UE

Europe

Depuis le début de l’année, une nouvelle dynamique semble être à l’œuvre dans la négociation institutionnelle entre l’UE et la Suisse. D’après plusieurs sources concordantes, les négociateurs suisses et européens ont réalisé des progrès importants sur plusieurs questions sensibles.

C’est le cas pour la question du règlement des différends, sur le point d’être résolue. Après plusieurs atermoiements durant la négociation, les parties semblent en effet s’être entendues autour d’un concept prévoyant un tribunal arbitral comme seule instance compétente à trancher les disputes. Dans certains cas, dont le périmètre exact reste encore à définir, la Cour de Justice de l’UE donnerait un avis interprétatif sur le conflit en question. C’est aussi le cas des aides d’Etat. Les parties semblent être tombées d’accord pour insérer des dispositions non-justiciables dans le futur accord et aussi pour traiter la question plus en détail dans des accords ultérieurs (p.ex. celui sur l’électricité).

Toutefois, quelques questions restent encore en suspens. L’une des plus importantes est la réforme de la règle dite « des 8 jours » qui fait partie de l’arsenal des mesures d’accompagnement de la libre circulation des personnes mis en œuvre par la Suisse. Bien que le Conseil fédéral s’emploie activement à trouver une solution consensuelle avec les partenaires sociaux, il paraît peu probable qu’un compromis puisse être trouvé rapidement sur la question.
Par conséquent, il faut se résoudre à un constat sans appel : il sera difficile de conclure la négociation institutionnelle avant la fin de l’année. Ceci pourrait constituer un problème conséquent pour la Suisse. En effet, l’UE a conditionné le renouvellement de l’importante équivalence boursière (MiFIR) à une avancée significative de la négociation institutionnelle d’ici à la fin de l’année 2018.

Or, nul ne sait à ce stade si les progrès récemment effectués seront suffisants pour persuader l’UE d’accorder ce renouvellement, d’autant plus que le texte en négociation n’a aucune valeur juridique. En théorie, ces progrès pourraient donc être remis en cause par l’une des parties.
Dans ces conditions, il convient de proposer des solutions créatives pour sortir de cette impasse. L’une d’entre elles serait la réalisation d’un « rapport intermédiaire sur l’avancée de la négociation ». D’un point de vue politique comme juridique, cette formule est tout à fait réaliste et adaptée à la situation. En effet, elle a été très récemment employée par l’UE: en décembre 2017, les négociateurs européens et britanniques sont tombés d’accord pour conclure un rapport similaire. A la suite de quoi la Commission européenne avait estimé que les pourparlers sur le Brexit avaient suffisamment avancé pour qu’une négociation sur les relations futures soit envisageable.

D’un point de vue politique, un tel texte possèderait aussi plusieurs avantages :

1) Il offrirait à l’UE des garanties suffisantes quant à la bonne foi de la Suisse dans cette négociation. Berne montrerait ainsi sa volonté de la conclure sur la base de ce qui a déjà été accepté par les négociateurs suisses et européens.
2) Il lèverait le voile sur le résultat des négociations et dissiperait les fausses croyances fréquentes en Suisse à l’égard de l’accord institutionnel (p.ex. l’omnipotence supposée de juges étrangers).
3) Il offrirait un point de repère institutionnel aux Britanniques dans les deux négociations liées au Brexit (sortie et relations futures).

Idéalement, un tel rapport aurait une grande valeur politique, sans quoi les garanties susmentionnées seraient insuffisantes pour l’UE. Sur la forme, il pourrait prendre la forme d’un papier conceptuel d’une dizaine de pages dans lequel les parties souligneraient les principaux points sur lesquels elles sont tombées d’accord et esquisseraient les questions en suspens, tout en réaffirmant leur volonté réciproque de conclure un accord le plus rapidement possible.

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