La Svizzera è come la caverna di Ali Babà: Un conte devenu réalité?

Financial place

Cette phrase tonitruante a été prononcée en 2009 par l’ancien ministre de l’Economie et des Finances Giulio Tremonti, farouche opposant à toute forme d’arrangement fiscal avec la Suisse hors du cadre européen. En 2014, il semble toutefois que l’Italie, après s’être longtemps dissimulée, s’apprête à trouver la formule magique pour entrer dans la caverne; et la formule est suisse.

 

Cette formule ne se résume pas en un simple “sésame, ouvre-toi”. Elle repose sur la mécanique complexe du système du règlement du passé inspiré du modèle des accords d’imposition libératoire. La négociation mainte fois annoncée puis bloquée semble sur une bonne voie. Un gouvernement dominé par Enrico Letta du centre gauche, un ministère de l’économie et des finances dirigé par Fabrizio Saccomanni, un indépendant, l’ouverture de la révision de l’accord européen sur la fiscalité de l’épargne ainsi que le compromis final de MiFID II favorable aux pays tiers sont autant des facteurs contribuant à favoriser la formule suisse et à servir les intérêts conjoints de la Suisse et de l’Italie. Il est primordial que ces deux pays avancent sur cette voie dans la mesure où le règlement du passé offre une base de travail solide et sera manifestement une question bilatérale dans les années qui viennent.

Pourquoi l’Italie doit adopter la formule

L’Italie a annoncé vouloir mettre sur pied un programme d’auto-déclaration des avoirs non déclarés à l’étranger afin de permettre leur régularisation. Le fait que l’Allemagne, suite à l’échec de l’accord d’imposition libératoire, a laissé reposer sa stratégie de règlement progressif du passé sur une forme de déclaration volontaire, n’est pas anodin. Cette politique de l’auto-déclaration, unilatérale et relativement efficace, est un atout de poids pour l’Italie dans les négociations qui s’ouvrent avec la Suisse. l’Italie dispose en outré de multiples instruments pour combler les lacunes des régimes existants en s’appuyant sur les listes noires dont fait partie la Suisse (p. ex. la régulation No 51/E réglant l’imposition des dividendes de sociétés non soumises à l’imposition cantonale ou communale telles que les holdings ou les sociétés de domicile de résidents italiens ou à d’autres restrictions fiscales que ces listes noires imposent).

Malgré ces avantages relatifs, l’intérêt fondamental de l’Italie est de parvenir à la conclusion de cet accord. L’accord sur l’imposition libératoire comprend la possibilité d’une déclaration volontaire tout en la dépassant et en l’intégrant dans un cadre plus large balançant subtilement les intérêts du maintien de la protection de la sphère privée et le règlement complet du passé. Le système de l’accord offre des avantages qu’aucun système de déclaration automatique ne parvient à égaler dans la mesure, où selon les modèles, la déclaration automatique ne garantit ni l’anonymat et ni l’impunité des comportements passés, offrant moins d’incitatifs à l’auto-déclaration. Enfin, rien n’empêche l’Italie de maintenir son programme de déclaration volontaire, permettant d’éviter la fuite des capitaux vers des juridictions peu coopératives et tirant profit des avantages des deux systèmes.

L’Italie s’apprête à trouver la formule magique…

Pourquoi la Suisse doit défendre sa formule

Si l’accord d’imposition libératoire posait problème lorsqu’il était conçu comme la stratégie globale du Conseil fédéral, il offre en revanche des avantages tactiques pour régler le passé avec les partenaires les plus importants de la Suisse. Ainsi, il pourrait être conçu comme un règlement du passé couplé à un régime transitoire qui n’aurait plus l’ambition de remplacer l’échange automatique d’information. Enfin, l’accord augmente les alternatives à disposition des clients dans le mesure où les clients peuvent soit s’acquitter d’un impôt après coup sur l’ensemble de leurs avoirs, soit déclarer leurs comptes – avantage non négligeable pour assurer une transition progressive de la place financière suisse vers un nouveau modèle qui ne se fonde plus sur le secret bancaire.

Le conte devenue réalité

Malgré les défauts intrinsèques de l’imposition libératoire à la source, il est primordial que l’Italie et la Suisse s’engagent sur cette voie tant cette solution sert leurs intérêts conjoints. La question centrale reste toutefois de savoir dans quelle mesure cette solution permettra de débloquer les autres dossiers fiscaux (listes noires et sanctions indirectes italiennes, statut des frontaliers) ainsi que les questions relatives à la place financière (accès au marché suite à l’adoption de MiFID II). Une politique du linkage a peu de chance de prouver son efficacité dans la mesure où l’Italie dispose d’autres instruments à sa disposition telle que la déclaration volontaire. Une analyse du projet d’accord avec l’Allemagne laisse penser qu’il est illusoire de croire que l’accord permettra un large accès au marché italien pour les banques suisses. Cela d’autant plus que l’adoption de MiFID II et sa mise en œuvre ne sont pas définitives ou n’ont pas débuté. La récente adoption de MiFID II, laissant une grande partie de la politique d’accès au marché aux mains des Etats, offre toutefois une plus grande flexibilité à la Suisse dans la mesure où l’accès au marché reste bilatéral. Le règlement du passé, sans ouvrir immédiatement le marché italien, peut servir à créer un cadre favorable à la poursuite de telles négociations. Le bilatéral fait un retour remarqué et chaque initiative permettant de le développer et le renforcer doit être encouragée et soutenue.